Plan de protection de l’atmosphère
Monsieur le Maire, cher-es collègues, Mesdames, Messieurs,
« L’Etat et ses établissements publics, les collectivités territoriales et leurs établissements publics ainsi que les personnes privées concourent, chacun dans le domaine de sa compétence et dans les limites de sa responsabilité, à une politique dont l’objectif est la mise en oeuvre du droit reconnu à chacun à respirer un air qui ne nuise pas à sa santé ».
Ainsi dispose l’article 1 de la loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie du 30 décembre 1996.
Alors que plusieurs textes sont venus compléter et censés permettre l’application de ce droit à respirer un air qui ne nuise pas à la santé, force est de constater, que 16 ans plus tard, peu de mesures concrètes ont réellement été mises en œuvre tant au niveau national que local ; sans compter que le retard massif dans la sortie des décrets d’application de la loi ont rendu totalement inefficiente l’économie générale du texte. Les sanctions de l’Union européenne portant sur la violation des règles relatives à l’ozone et aux particules fines ne viennent que confirmer cette insuffisance récurrente.
On ne peut donc que déplorer l’inefficience d’un tel droit. Les questions de la qualité de l’air et de la pollution atmosphérique restent pourtant majeures en France et tout particulièrement en Ile-de-France. A titre d’exemple, Airparif constate que deux à trois millions d’habitants sont exposés chaque année à des niveaux de particules insatisfaisants en Île-de-France, notamment près des axes majeurs de circulation et dans le cœur de l’agglomération
Les études épidémiologiques montrent qu’il existe des effets de la pollution dès les concentrations les plus faibles, et qu’il ne semble pas exister de seuil protecteur en deçà duquel il n’est plus observé d’effet sanitaire. En l’absence même de « pics », la pollution atmosphérique a des effets sur la santé. Elle provient pour 45% du trafic routier, et en particulier des véhicules diesel. L’OMS indique à cet égard dans un rapport de juin 2012 classant les émissions des moteurs diesel comme cancérogène certain (groupe1) que les particules fines et gaz NOx [oxyde d’azote] tuent tous les jours, il y aurait environ 42 000 décès par an en France liés aux seules particules fines.
Je ne vous apprends rien, la ville d’Ivry- sur-Seine n’échappe pas à ces risques.
De nombreux décès anticipés sont à relever dans l’agglomération, les nourrissons sont soumis, pour la plupart d’entre eux, à des bronchiolites, les allergies et les maladies asthmatiformes ne cessent d’augmenter sans compter les conséquences des forts épisodes de pollution sur les personnes âgées et les malades cardiaques, sans parler des effets à long terme encore moins bien connus… et une espérance de vie réduite pour tous d’en moyenne 6 mois ! Tout cela dû à des dépassements réguliers des seuils européens, près de 35 fois en 2012…
Parmi les instruments de planification visant à réduire le niveau et les effets de la pollution atmosphérique sur la santé ainsi que sur l’environnement et à se conformer à ces seuils européens, se trouve le Plan de Protection de l’Atmosphère (PPA).
Pour rappel, ce plan, élaboré par les services de l’Etat pour les agglomérations de plus de 100 000 habitants, a pour but de fixer les orientations à moyen et long terme permettant de prévenir ou de réduire la pollution atmosphérique, de fixer les principales mesures préventives et correctives d’application temporaire ou permanente pouvant être prises en vue de réduire les émissions des sources de pollution atmosphérique, d’utiliser l’énergie de manière rationnelle et d’atteindre les objectifs fixés pour la qualité de l’air.
En 2005, consulté sur le précédent Plan de Protection de l’Atmosphère, notre conseil municipal avait émis un avis défavorable, déplorant le manque d’ambition sur les résultats, les échéanciers, les polluants estimés… Bien que le plan révisé réponde sur quelques points aux demandes faites par le Conseil Municipal en 2005, nous sommes encore loin du compte avec ce nouveau plan.
Ainsi, il n’y a pas de préconisations spécifiques en matière de réduction de la circulation lors des épisodes de canicule alors même que ces épisodes risquent de se multiplier sous l’effet du changement climatique et donc d’avoir des conséquences graves sur la santé de la population.
On peut relever également qu’il n’y a pas d’inscription dans ce plan relative à l’étude de la mise en place de valeurs limites, de dispositifs d’alerte et d’information.
Sont aussi en ligne de mire l’absence d’inscription sur l’étude des impacts sanitaires des particules recensées dans les enceintes souterraines, l’obligation pour les responsables des projets de construction de nouvelles infrastructures souterraines, l’obligation d’intégrer la problématique de la qualité de l’air en phase de conception, ce que suggèrent les auteurs de l’étude de l’Observatoire régional de la santé d’Ile de France.
Ce plan ne permet donc pas en l’état de garantir aux franciliens et donc aux Ivryiens l’effectivité de leur droit à respirer un air qui ne nuise pas à leur santé .
C’est pourquoi, je vous propose de donner un avis défavorable à ce projet de PPA.
Nous souhaitons notamment que ce PPA intègre des dispositions spécifiques aux épisodes de canicule, à la révision des critères relatifs aux Zones d’actions Prioritaires pour l’air et au « bonus malus », des dispositions portant diminution de la vitesse autorisée sur tous les grands axes franciliens, des mesures visant à aller vers la ville à 30 km/h, des mesures visant à réduire les avantages fiscaux octroyés aux véhicules diesel ainsi des propositions d’étude sur la problématique de la pollution dans les enceintes souterraines des transports ferroviaires.
Nous réaffirmons, une fois de plus, la nécessité d’intervenir sur notre territoire face à l’urgence sanitaire que représente la pollution atmosphérique. L’enjeu est énorme. C’est pourquoi, je pense que nous devrions nous orienter, comme il est préconisé pour l’élaboration du Plan bruit, que j’aurai l’occasion de vous présenter lors d’un prochain conseil, vers des zones de protection de l’atmosphère autour des établissements sensibles (crèches, écoles, maisons de retraite, hôpitaux).
Nous demandons aussi que des moyens humains et financiers suffisants soient mis en place pour permettre la mise en œuvre effective des actions pour une effectivité du droit à respirer un air qui ne nuise pas à la santé.
Merci.