Au Conseil Municipal Extraordinaire du 15 octobre 2015

Le jeudi 15 octobre 2015, un Conseil Municipal Extraordinaire fut réuni, afin de de se prononcer sur le projet de décret portant sur la création des territoires de la métropole du Grand Paris et valider ou non le périmètre retenu pour le « Territoire 12 » qui inclut Ivry. Mehdy Belabbas a pris la parole au nom du groupe des élu-e-s EELV d’Ivry pour dénoncer la mise en place autoritaire et antidémocratique de la Métropole du Grand Paris. Il a toutefois rappelé que la question du bon niveau de gestion pour certaines problématiques n’en restait pas moins légitime. C’est notamment le cas pour l’ensemble des problématiques environnementales qui est immense et qui constitue le principal défi de ce nouveau millénaire. Pour répondre à ces défis, il n’est pas permis de faire l’économie d’outils dont la taille et la masse critique pourront apporter des solutions durables et efficaces.

Métropole du Grand Paris
Point A – Avis du Conseil Municipal sur le projet de décret
Intervention de Mehdy Belabbas au nom du groupe EELV

M. Le Maire,

Mesdames et Messieurs,

Mes cher-e-s collègues,

Nous devons ce soir donner l’avis du Conseil Municipal sur le projet de décret portant sur la création des territoires de la Métropole du Grand Paris et – en ce qui nous concerne – valider ou non le périmètre retenu pour le « Territoire 12 » qui inclut Ivry.

Quelques mots tout d’abord pour rappeler que la création de la Métropole est un véritable « choc institutionnel » comme l’a souligné Monsieur le Maire. En effet, il ne s’agit ni plus ni moins que d’une forme très agressive de recentralisation se cachant sous les oripeaux de la sacro-sainte « efficience » de l’action publique, de la modernisation pour la modernisation, de la fin supposée du mille feuilles administratifs, et qui se traduit par la fameuse « réforme », véritable obsession de tous les gouvernements se succédant depuis près d’un quart de siècle.

Cette démarche, impulsée par le gouvernement, trouve ainsi son origine dans une réflexion ancienne, souvent mise en avant dans plusieurs rapports gouvernementaux et institutionnels (le Comité « Balladur » pour la réforme des collectivités locales en 2009, le Rapport annuel de la Cour des comptes de 2014 soulignant les failles de gestion des collectivités locales, par exemple), ainsi que dans de nombreuses publications élaborées par divers « think tanks » plus ou moins objectifs : les collectivités sont mal gérées, gaspillent les deniers publics et sont endettées, etc. Autant d’accusations caricaturales du travail des communes.

L’éthique de conviction qui nous anime nous commande donc de dénoncer avec virulence cette construction antidémocratique d’un autre temps, qui aura, de plus, un effet pervers sur la représentativité démocratique en accélérant un phénomène de bipolarité politique artificiel, stérile et caricatural.

Comme l’écrivait Montesquieu, « Une chose n’est pas juste parce qu’elle est loi ; mais elle doit être loi parce qu’elle est juste. »

Nous, élu-e-s écologistes d’Ivry, sommes fidèles à l’esprit des lois, étant entendues que ces dernières doivent être élaborées de manière fidèle à la véritable tradition républicaine. La loi pour et par le peuple, pas contre.

Cela est d’autant plus dommageable que notre pays se targue, par ailleurs, de donner des leçons de démocratie à la terre entière…
Deux poids, deux mesures, comme sur bien d’autres sujets d’ailleurs !

Dans cette perspective, nous regrettons solennellement que l’avis des conseils municipaux ne soit sollicité que maintenant, une fois la loi votée. Si les Maires ont été sollicités, les simples conseillères et conseillers municipaux que nous sommes ont été maintenus à l’écart des discussions. Et que dire de la population, qui n’a, à aucun moment, été informée ou consultée à l’occasion – par exemple – d’un grand débat public.

Je l’affirme, on nous a confisqué le débat et la parole, alors que c’est de notre quotidien et de notre avenir dont il s’agit pourtant !

Aussi, vous me pardonnerez si, ce soir, je vous donne l’impression de me répéter sur ce sujet. Ce n’est pas par manque d’inspiration, c’est simplement l’expression de la continuité des positions défendues par les élu-e-s écologistes.

Et comme vous le savez, mes cher-e-s collègues, la pédagogie est l’art de la répétition !

Ainsi, lors du Conseil Municipal du 25 septembre 2014, il nous avait été demandé de nous prononcer sur l’intégration de Valenton à la Communauté d’agglomération Seine-Amont (CASA) ; notre groupe s’était abstenu, tout en souhaitant la bienvenue aux Valentonnaises et Valentonnais. Notre abstention se voulait bienveillante mais vigilante, car nous tenions à affirmer notre désapprobation quant au manque de concertation, ainsi qu’à l’absence de débat démocratique qui ont accompagné la création et l’élargissement de la CASA.
Et oui, cher-e-s collègues du Front de Gauche, vous reprochez aujourd’hui au gouvernement ce que vous avez pourtant appliqué hier en créant la CASA. Vous aviez, à l’époque, dédaigné les idées que nous vous avions soumises, notamment le rapprochement avec la communauté d’agglomération de Val de Bièvre (CAVB). Si nous avions procédé de la sorte, nous aurions pu anticiper la démarche gouvernementale – pourtant limpide – et nous préparer dans de bien meilleures conditions !

Comme l’affirmait Sun Tzu, six siècles avant notre ère, « Celui qui excelle à résoudre les difficultés le fait avant qu’elles ne surviennent ».

Mais le passé est le passé et il nous faut maintenant nous tourner vers l‘avenir.

Ce qui demeure, ce sont les idées de transparence et de consultation des populations concernées par la décision publique – qui sont des exigences démocratiques de plus en plus prégnantes chez nos concitoyen-ne-s – et qui sont inscrites au cœur de l’action du groupe EELV d’Ivry.

Nous sommes cohérents et les mêmes causes entrainant les mêmes effets, nous ne pouvons donc que rejeter le projet de décret gouvernemental et le périmètre qui nous est proposé.

Mais si l’éthique de conviction nous anime, n’oublions cependant pas l’éthique de responsabilité qui doit également guider nos choix en tant qu’élu-e-s de la République.

Nous devons sortir par le haut du guêpier technocratique dans lequel le gouvernement nous a attiré et essayer d’adopter -malgré tout – une attitude constructive, dans l’intérêt supérieur de nos administré-e-s.

Ainsi, j’aimerais tout d’abord dire que tout n’est pas à rejeter dans ce décret ainsi que dans la démarche de constitution de la Métropole du Grand Paris. Sur le périmètre tout d’abord, nous avons toujours été favorables à ce que le Territoire épouse au mieux les contours de l’Opération d’Intérêt National (OIN) Orly-Rungis-Seine Amont. Et c’est aujourd’hui le cas.

Toutefois, en tant qu’écologistes, nous sommes attachés à l’autonomie des individus et des collectivités locales.

Les conseils municipaux de Valenton et de Villeneuves St Georges ont tous deux délibéré et voté d’abord pour intégrer la CASA et par la suite pour partager notre destin commun, au sein du futur nouveau Territoire. Balayer d’un revers de main les votes de ces deux Conseils Municipaux va à l’encontre de nos convictions.

Pour les écologistes, la commune est l’échelon de proximité par excellence, car il permet de répondre au plus près aux besoins de la population. De plus, en termes de transition écologique de la société, la commune doit rester un acteur incontournable.

Cependant, le nouveau territoire sera doté de compétences élargies qui étaient auparavant de notre ressort, comme la gestion des déchets ménagers et assimilés, le Plan Local d’Urbanisme, la politique de la ville, les équipements culturels et sportifs d’intérêt territorial, pour ne citer que les plus emblématiques.

Et au risque de choquer mes cher-e-s collègues, nous ne devons pas non plus nous interdire une nécessaire réflexion quant au niveau de gestion le plus pertinent concernant certaines problématiques. Je l’ai dit, en termes de transition écologique de la société, la commune est un acteur incontournable. Néanmoins, l’ensemble des problématiques environnementales est immense et constitue le principal défi de ce nouveau millénaire. Et pour répondre à ces défis, nous ne pourrons faire l’économie d’outils dont la taille et la masse critique pourront apporter des solutions durables et efficaces. Or, le territoire aura le plan climat-air-énergie en compétence propre. Et c’est, de notre point de vue, la bonne échelle pour conduire cette politique.

Ne vous méprenez pas, mes cher-e-s collègues, la méthodologie gouvernementale présidant à la construction de la Métropole et des territoires est exécrable et représente un parfait contre-exemple en la matière ! Le temps des Oukases est révolu !

La question du bon niveau de gestion pour certaines problématiques n’en reste pas moins légitime.

Par conséquent, si nous votons résolument avec la majorité municipale contre ce projet de décret, nous devons – de même – faire preuve de nuance dans notre jugement et nos actions futures, au nom de l’intérêt supérieur des Ivryennes et des Ivryens.

Et puis, comme le soulignait cet esprit fin qu’était Nicolas Machiavel, “Là où la volonté est grande, les difficultés diminuent.”

Méditons le conseil avisé du brillant Florentin !

Ceci étant posé, le groupe des élu-e-s EELV d’Ivry votera contre le projet de décret fixant le périmètre des territoires.

Je vous remercie.